MERE-GRAND VEUX TOUT SAVOIR, AVANT, DANS LE MONDE DES CONTES, T’ÉTAIS QUI ?

Les histoires que l'on nous racontent ne sont pas toujours toutes belles et elles n'ont pas toujours une fin heureuse. Il faut cependant se méfier, car si l'on se penche bien sur celles que l'on nous content, nous aurons peut-être l’œil. Nous verrons peut-être ce que chacune contient, son message caché. Sa morale. C'est ce que dans un autre monde, bien différent de celui-ci, les grands critiques et analystes littéraires tenteront de faire. Lire entre les lignes. Faire une psychanalyse des histoires pour enfants, car elles les éduquent en leur faisant passer un message important, mais ils ne peuvent pas se rendre compte parfois, de la brutalité et de la cruauté de celles-ci.  Mais je ne suis pas là pour vous parler de l'un des contes les plus répandus ; non, je ne parlerai ni de princesse ni de prince. Je ne chercherai pas à vous faire passer un message non plus d'ailleurs, je vais seulement vous raconter une histoire. Ce n'est sans doutes pas la plus triste, ni la plus heureuse, ni la plus réfléchie, ni la plus belle. Elle n'a pas à rentrer dans une catégorie spéciale à vrai dire, tout ce qui compte, c'est qu'elle reste spéciale. Beaucoup de contes concernent les êtres humains, les êtres féeriques aussi. D'autres parlent d'animaux. Non, ce conte-ci n'a rien d'extraordinaire, donc oubliez les fées et les sortilèges. Elle n'est pas magique à proprement parler. Ceci étant dit, il est temps que je vous raconte cette histoire. Mon histoire.

Au cœur de Fantasya, dans cette magnifique cité dont on refuserait de s'en aller, vivait une famille brisée. Elle n'était pas grandement malheureuse, mais un homme avait perdu sa femme quelques années auparavant, se retrouvant seul pour élever sa petite fille, portant le nom de Jane. Son nom à lui était Archimède, Archimède Porter. Il mit plusieurs mois avant de faire son deuil, mais il ne plongea pas dans les méandres du désespoirs car il n'était pas seul. Elle était là pour lui, et il serait là pour elle. Elle ne comprenait pas la mort, et elle le savait son père. C'était là tout ce qui comptait à ses yeux, alors finalement, cela comptait suffisamment pour lui aussi. Il l'éleva en lui contant mille histoires qu'il inventait bien souvent, lui parlant de créatures étrangères à ce pays, et que personne n'avait jamais vu encore. Au fond, il ne savait même pas s'il s'agissait plus de légendes ou de faits réels. Si ces animaux existaient vraiment ou si quelqu'un les avaient tout bonnement imaginés. Mais il s'en faisait la promesse ; un jour, il irait dans la jungle de Nymeïs et il découvrirait la vérité. Il saurait s'il s'était bercé d'illusions toutes ces années ou s'il avait eu raison de croire. Il était scientifique, aussi il n'attendait qu'une chose : quitter Fantasya pour s'aventurer dans cette terre inconnue et inexplorée. Par lui. Mais le monde de la science devait aussi explorer cet endroit, découvrir ses secrets... et peut-être les dévoiler, qui sait.

Puis Jane grandit avec ces histoires plus folles les unes que les autres, songeant au fait qu'il devait exister des êtres lui étant semblables mais différentes. Ce qui l'intéressait le plus parmi toutes ces créatures dont son père lui parlait, c'était les singes. Mais plus particulièrement les gorilles... elle n'aurait su expliquer pourquoi, mais elle vouait une fascination plutôt étrange et rare envers ces primates dont elle avait simplement entendu parler. Cependant, personne n'en avait fait de croquis, tout ce qu'on possédait était des descriptions physiques et comportementales. Il s'agissait d'études passées, scientifiques, d'il y a de nombreuses années. Son père s'était approprié le sujet depuis quelques années maintenant, et mettait de l'argent de côté pour faire ce voyage, accompagné de Jane. Seulement, même s'il pouvait se permettre de partir comme ça, il ne pouvait partir seul. Pas seulement avec elle. Il rechercha alors un homme pour venir avec eux, pour les protéger du danger qui pourrait se trouver là-bas, dans la jungle. C'était une mesure de sécurité indispensable, et il avait finalement trouvé quelqu'un en la personne de Clayton. C'était un homme plutôt grand et baraqué, charmant et poli, mais aussi un peu bourru et impatient. Mais il fallait bien s'en contenter, aussi Archimède et Jane préparèrent leurs paquets et avec Clayton, ils partirent enfin en direction de Nymeïs.

La jungle était un endroit à la fois dangereux et merveilleux. Ils avaient trouvé l'endroit parfait pour planter leur campement, et ils se préparaient déjà à aller explorer cette terre inconnue afin de découvrir ses secrets et si ce qu'ils avaient entendu dire était vrai. Pour Jane, il s'agissait surtout de voir des singes, surtout les gorilles. Elle y tenait plus qu'à tout au monde, ce qui  n'était pas spécialement... ordinaire, pour une jeune femme de son âge. Mais au fond, elle avait toujours voulu en voir et était fascinée par eux. Peut-être avait-elle tord ? Et s'ils n'existaient pas ? Peut-être qu'ici, elle tomberait de haut. Qu'elle ne verrait rien de ce qu'elle attendait, qu'elle se rendrait compte que ce qu'elle avait toujours voulu voir n'était que l'invention de l'imagination d'un scientifique un peu trop rêveur ou menteur. Mais elle ne songeait pas un seul instant à cette possibilité. Ils étaient en sécurité avec Clayton de toutes façons. Enfin... peut-être un peu trop. Cette grosse brute s'amusant à tirer sur tout ce qui bougeait, même les branchages et les buissons. Archimède n'avait rien contre cet homme, il était plutôt naïf et trop gentils pour se rendre compte qu'il allait devenir l'un des plus grands dangers qui se trouvait en ces lieux. Jane quant à elle, se méfiait de cet homme, mais elle l'appréciait tout de même un peu.

Un beau jour, la jeune femme croisa le chemin d'un adorable petit chimpanzé et elle dessina sans plus attendre de le dessiner. Il mangeait une mangue et il était tellement... quelque part, il était tant semblable à un être humain, mais sans vraiment l'être, que Jane en fut toute retournée, à tel point qu'elle en oubliait que finalement, ce singe n'était qu'un... animal. Et les animaux n'ont pas les mêmes règles et lois que nous. Aussi, le petit être recouvert de poils vola le carnet de croquis de la belle, et il partit avec, en arrachant plusieurs pages avant de conserver celle où elle avait tracé ses courbes à lui, sa position lorsqu'il avait dévoré ce succulent fruit et même ses poils, en grande partie. Son expression, tout y était. Puis Jane décida de lui jouer un tour pour récupérer son croquis, après avoir soigneusement récupérer toutes les pages arrachées de son carnet, ainsi que ce-dernier. Mais voilà, ce n'était pas parce qu'elle avait reprit ce qui lui appartenait que le bébé chimpanzé allait simplement repartir comme ça ou lutter. Tout un groupe de singes de son espèce, dont ses parents étaient perchés sur les branches des arbres entourant l'impuissante idiote qui aurait simplement du laisser le mammifère repartir avec ce fichu dessin.

Bien que cela était assez mal parti pour la jeune femme, elle n'était pas totalement malchanceuse. Alors qu'elle croyait, en fuyant les singes qui la coursaient plus vite qu'elle ne l'aurait pensé, que tout était perdu et qu'elle allait sans doutes se faire agresser ou tuer par ces créatures... elle fut sauvée. Suspendue au-dessus du sol, volant dans les airs sans faire le moindre effort, elle comprit assez vite que quelqu'un – ou quelque chose – venait tout bonnement de lui sauver la vie. Elle crut néanmoins être vouée à mourir en se rendant compte que la horde de chimpanzés était toujours à l’affût et qu'une espèce d'homme sauvage la tenait, se balançant de liane en liane, sans la moindre peur dans le regard. Mais... il n'y avait pas des lianes partout. En se rapprochant d'un fossé, elle crut vraiment que tout était fini pour elle, voir même pour lui. Sauf qu'elle sous-estimait cet étranger, car il semblait... plus animal qu'il n'était humain. Il la fascinait. Il agissait, communiquait et se comportait comme un singe, mais physiquement, il était comme elle. C'était à la fois étrange et extraordinaire... Ils parvinrent alors à se retrouver en sécurité dans un arbre immense où les singes ne se trouvaient pas, et ce fut le déclic. La rencontre. Deux mondes qui rentraient en collision.

« Je vous jure père ! Cet homme sauvage était à CA de moi ! Et il parlait et agissait comme un singe... oui, un singe ! J'en ai vu, pleins ! Des chimpanzés, d'après ce que vous m'avez enseigné. Il était... comme vous et moi. Mais il était différent. […] Tarzan. Il s'appelle Tarzan. »

Cette rencontre l'avait bouleversée, et elle changerait sans doutes le cours de sa vie. Son voyage ne s'arrêterait certainement pas là, elle le revit et entre temps, avec son père et Clayton, elle aperçu des nids de gorilles. Il y en avait également une description dans les bouquins qu'ils avaient emmenés ici avec eux. Et Tarzan. Elle lui montra, avec Archimède, le mode de vie à Fantasya, ce qu'il s'y passait, comment étaient les gens... et il lui montra comment se comporter comme un singe, et comment parler comme eux. Chacun tentait d'apprendre et de s'instruire à son tour, et ils aimaient ce petit « jeu » qui indirectement, finissait par les rapprocher. Et sans vraiment s'en rendre compte, ils tombaient peu à peu dans les bras de l'autre. Mais c'était peu conventionnel, et cela ne pouvait pas marcher. Jane ne se rendant compte de rien, décida de rester sur la piste des gorilles et demanda quelques fois à Tarzan de les conduire à eux. Ils étaient venus principalement pour ça. En tous cas, elle, elle était venue pour ça.


Durant les moments passés ici, elle put néanmoins découvrir toute la beauté que regorgeait cet endroit. Il lui fit découvrir des animaux exotiques que jamais elle n'aurait pu découvrir nulle part ailleurs, et elle put remplir de maints dessins son carnet de croquis. Elle était heureuse, elle se sentait vivante. Elle n'appartenait pas au monde des hommes, à la vie à Fantasya, à toutes ces contraintes. Elle était libre lorsqu'elle était ici. Elle était ébahie devant tout ce qu'elle voyait, et jamais elle ne pourrait se lasser de tout ça. C'était bien trop beau pour être vrai, souvent elle avait l'impression de se retrouver au beau milieu d'un rêve. Parfois elle en venait à se pincer ou à vérifier d'une façon ou d'une autre qu'elle était bien éveillée. Ce n'était techniquement pas son élément cependant, elle était censée vivre avec les autres êtres humains, là-bas... mais si lui il avait vécu toute sa vie ici et qu'il s'en portait plutôt bien, pourquoi ne pourrait-elle pas faire de même de son côté ? Elle pourrait bien rester, avec lui. Mais c'était impossible... elle devrait rentrer, et elle devrait avoir vu ces fameux gorilles. Le jour J approchant à grands pas, elle dut dire au revoir à Tarzan et cette jungle qui regorgeait de merveilles. Le cœur lourd, les larmes aux yeux et une boule dans la gorge, elle décida de s'exiler quelques temps pour faire face, seule, à son chagrin.

A son retour au campement, Tarzan était avec Clayton. Rejointe de son père, ils apprirent alors que l'homme singe allait les conduire jusqu'aux gorilles, finalement. Une fois sur leur territoire, Archimède et Jane furent tout de suite en immersion totale avec cet autre monde, ces autres créatures magnifiques qu'ils avaient tant voulu rencontrer. Pas de croquis cette fois, rien si ce n'était la communication. Bien que ce soit différent de l'histoire même de Tarzan ou de la rencontre entre celui-ci et Jane, cette fois-ci, quelque chose changeait la donne ; Kerchak. La découverte – et rencontre – du chef de leur tribu. Le protecteur suprême, le grand manitou. Les gorilles, au fond, avaient aussi leurs règles. Tarzan ne les avaient pas respectés, tout simplement. Pourquoi désobéir aux ordres du chef ? De son « père » ? Cela ne concerne pas vraiment notre histoire, ce qui compte arrive bien trop vite. Kerchak attaqua Clayton qui le menaçait de son fusils avant que Tarzan ne vienne les séparer.

Alors, les trois étrangers durent fuir. Cependant, Jane avait proposé à Tarzan de venir avec  eux lorsqu'ils repartiraient, comme il lui avait proposé de rester avec lui ici. Attendant une réponse, ou au moins de pouvoir lui dire adieu, elle attendit sur la plage qui les séparaient du bateau qui les reconduiraient chez eux, à contre cœur. Puis finalement, il arriva et ils partirent tous ensemble sur le bateau qui les reconduirait à Fantasya. Seulement, une fois arrivés sur le pont, l'équipage qui s'avérait être corrompu et sous les ordres de Clayton, nous fit enfermer, tous, et plus particulièrement l'homme singe. Le but, tout ce temps, du « chasseur » avait été de trouver le repère des gorilles afin de les capturer et de les ramener au pays pour les vendre. Ils s'étaient faits avoir comme des rats. Fort heureusement, de précieux amis de Tarzan étaient venus les secourir ; Tantor et Tok. Ils purent ainsi s'évader et aller sauver les gorilles qui étaient aux mains de ces barbares. Je me contenterais de vous dire qu'une fois arrivés sur le territoire des singes, tout n'était que flammes, coups de feu, gorilles emprisonnés dans des cages et que leurs hurlements vous auraient probablement brisé le cœur.


Par chance, avec l'aide des éléphants, des chimpanzés et d'autres animaux, ils parvinrent à libérer tous les gorilles, dont la mère de Tarzan, mais l'un d'eux en tentant de protéger l'homme sauvage, fut tué. Kerchak tomba à terre, sous le regard hautain et fier du chasseur. Jane et Archimède, ainsi que tous les gorilles sont alors partis loin des flammes, guettant tout de même le duel final, celui entre Clayton et Tarzan. La pluie et la foudre se mêlèrent alors à tout ce tinta-pan, éteignant peu à peu le brasier et calmant peu à peu les mœurs tout en marquant la tristesse des âmes brisées par la mort de leur chef. Durant le « combat », Clayton fit une longue chute, tombant dans un ravin. Il aurait été considéré comme miraculeux le fait qu'il ait pu survivre, aussi on le songea mort, et alors qu'un silence de mort était tombé... le nouveau chef de la horde des gorilles prit la tête de son groupe, partant avec celui-ci. Jane et Archimède finirent par attendre le lendemain avant de faire leurs adieux à Tarzan et à la jungle, mais cet au revoir brisait plus que tout au monde le cœur de la jeune femme. Elle refusait de quitter cet endroit, de rentrer dans ce lieu où elle n'avait pas sa place et de s'éloigner de l'homme dont elle était tombée amoureuse. Mais à peine embarqués sur leur petite barque les menant au bateau, son père lui fit comprendre qu'au fond, elle n'avait pas à s'en aller. Qu'elle l'aimait.

C'est ainsi que Jane, et finalement Archimède, retournèrent sur la plage pour vivre ici, dans la jungle. C'était là où ils devaient être. Leur place était nulle part ailleurs. Alors, Jane put rester avec Tarzan et avec son père, ils purent faire partie de ce monde. Ce monde auquel ils n'étaient pas censés être liés, mais c'était le monde auquel ils appartenaient. Ils purent vivre dans ce petit paradis quelques semaines durant, et aussi bien l'homme singe que la jeune femme finirent par découvrir ce que leur réservait l'amour et le futur qu'ils pourraient avoir ensemble. Ils ne se projetaient pas vraiment au fond, ils vivaient, tout simplement. Et c'était ça qui lui plaisait. Son père également aimait cette vie, et aucun des deux ne l'aurait échangée. C'est peut-être un coup du sort, finalement qui leur est arrivé. A eux et au monde entier... lorsque cet immense nuage de magie vint s'abattre sur eux. Leur bonheur ne pouvait pas durer. Il n'y avait pas de fin heureuse, pas même lorsque vous n'étiez personne. Pas une méchante reine, pas même une princesse. La fin heureuse, c'était Clayton qui l'obtenait. Pas eux. Pas nous...